"Lors d'un entretien le Président Lula me dit : "La vraie bombe atomique n'est ni en Iran, ni en Corée du Nord. La vraie bombe atomique, c'est la faim !". Ce fut un premier déclic. Un deuxième déclic suivit quelques minutes plus tard, après que les Présidents Chirac et Lula eurent avoué leur certitude qu'il serait désormais impossible aux pays occidentaux de continuer à financer le développement dans les pays pauvres. Leur budget ne le permettrait pas. Il fallait impérativement réfléchir à de nouvelles sources d'argent si on voulait réellement aider les pays pauvres. La crise n'était pas encore là et on se demande aujourd'hui comment on pourrait bien obtenir d'un député grec ou espagnol d'allouer quelques centaines de millions supplémentaires à la lutte contre les épidémies ou l'analphabétisme en Afrique ? Ce serait évidemment impossible. UNITAID, basé sur une micro taxe de un euro sur les billets d'avion, permit de donner corps à notre idée de départ : faire contribuer à la solidarité les activités globalisées, celles qui bénéficient le plus de la mondialisation; qu'il s'agisse de tourisme mondial, de finance, d'Internet, de transport maritime ou de téléphonie mobile. Contributions microscopiques certes, mais qui, additionnées, multipliées par des centaines de millions, pouvaient permettre à des millions d'êtres humains d'accéder à la dignité et aux droits essentiels et vitaux. Je suis convaincu que les Financements Innovants sont la seule solution pour fournir les biens publics mondiaux (nourriture, eau potable, santé, éducation, assainissement, planning familial,…) à chaque être humain. Aujourd'hui, j'ai le privilège et la responsabilité de pouvoir oeuvrer à une politique de la mondialisation qui soit un catalyseur de justice et de Paix, ces idéaux qu'on avait crus galvaudés, mais que nous pouvons pourtant concrétiser".

Homme politique, maire, député et plusieurs fois ministres (Santé, Culture, Affaires étrangères), Philippe Douste-Blazy est actuellement conseiller spécial du Secrétaire général des Nations unies, chargé des sources novatrices de financement du développement. Il préside UNITAID. Jacques Plouin est ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure (Paris) et docteur en philosophie. Les enjeux de la mondialisation sont au coeur de son double parcours de prospectiviste, mené notamment au sein de l'UNESCO, et d'universitaire, passé par l'Université de Provence, les Universités de Californie de Davis et de Berkeley ainsi que Sciences Po Paris.

La montée ahurissante des inégalités ne pourra pas continuer indéfiniment. Nous pouvons participer à la création d'un capitalisme nouveau basé sur des contributions de solidarité. Demain, nous serons tous plus riches d'avoir combattu les inégalités. Négliger la solidarité serait une erreur morale, géopolitique et économique.