À différentes époques de son histoire, l'humanité a cru que tel ou tel mode de connaissance allait lui donner la science absolue : tour à tour, la mathématique, la logique, la physique, les sciences naturelles ou la chimie ont fait l'objet de cette illusion.

Vers les années 1960-70, la linguistique a partagé ce destin. On a cru qu'elle serait la clé des sciences et même des arts. Qui n'appliquait pas la notion de message et de code à la littérature, à la musique ou l'architecture passait pour un attardé. Situation agréable pour les linguistes, dont les livres atteignaient des tirages enviables, même lorsqu'ils n'étaient en réalité accessibles qu'à un public hautement spécialisé. Mais situation fâcheuse pour la véritable science linguistique, confondue trop souvent avec l'art de masquer par une obscurité prétentieuse une pensée vide ou une idéologie destructrice.

Ces dernières années, la linguistique est revenue de cet excès d'honneur et de cette indignité. On a compris qu'elle ne s'applique qu'à son propre domaine, celui du langage humain, et que la logique abstraite ne peut être le moyen de comprendre la formation et le fonctionnement des langues, modelées de façon infiniment complexe à partir des possibilités offertes par les organes humains et suivant le développement des expériences humaines.

Le présent ouvrage vise à offrir aux étudiants et aux curieux de la langue française un tableau de celle-ci éclairé par deux grandes perspectives, la perspective historique et la comparaison avec quelques grandes langues voisines. On y trouvera un exposé dépourvu de vues doctrinaires de la place du français dans les langues du monde, de son développement depuis que des documents nous permettent de saisir son histoire, de sa structure phonétique, lexicales et grammaticale.

Il n'a pas d'autre ambition que de fournier une base intelligible à la connaissance d'une langue qui restera de toute façon un monument de l'esprit humain.