Une chronique familiale où l'humour d'Anita Brookner s'avère toujours aussi noir, le trait aussi fin et pudique. Un roman étincelant d'intelligence. "Dolly était une annexe de notre petite famille, un appendice qui ne fit jamais partie du texte principal. Nous en étions tous conscients, Dolly y compris, mais comme elle ne se considérait comme plus intéressante que notre petit groupe uni et sans surprise, elle nous acceptait avec plaisir à la périphérie de son univers et de ses intérêts. Il était important pour elle de se sentir admirée, et ma mère lui vouait une sincère admiration non, comme Dolly le croyait, pour son aisance sociale, mais pour son indéniable sens des réalités. Il est ainsi possible d'admirer, tout en le désapprouvant, quelqu'un capable de dépasser les limites que l'on s'est soi-même fixées. Dans une situation de ce genre, il est même possible d'admirer le manque de modestie, la vanité, l'absence de scrupules (...) A mesure que sa propre vie sociale s'élargissait, ses visites s'espaçaient. Ma mère lui téléphonait régulièrement, pour s'entendre conter ses invitations et ses triomphes. Ce n'était qu'à la fin de ces conversations que Dolly émaittait un péremptoire : "Et vous ? Tout va bien ? - Oh oui, bien sûr, disait ma mère. Nous allons tous très bien". Séductrice à la silhouette d'odalisque, Dolly est résolue à obtenir ce que la vie lui doit. Jane, sa nièce, est une enfant de l'ombre qui rêve secrètement de devenir écrivain et observe la scène familiale. Entre elles, une relation ambivalente où se mêlent fascination et exaspération. Une alliance qui révélera peu à peu ses enjeux, les plus souterrains et les moins attendus.