De 1944 à 1958, Arthur Conte, jeune député, fut aux premières loges de la IVe République. Observateur inlassable, curieux des faits et des hommes, il nous fait revivre, avec sa verve sans pareille, ces quinze années hautes en couleur, pleines de bruit et de fureur, mais qui, malgré deux guerres, d'Indochine et d'Algérie, et sur fond de crises politiques et sociales à répétition, accouchèrent de la France moderne. Du de Gaulle de la Libération au de Gaulle de 58, tous les acteurs de la IVe sont là, hauteur de vue et petitesses mêlées : Auriol, Blum, Bidault, Pinay, Mitterrand, Mendès France, Mollet, Thorez, Coty.. Ni Pétain ni Bousquet ne manquent au tableau. Pas plus que de Lattre, Leclerc, l'abbé Pierre, Hô Chi Minh, Poujade, Bourguiba, Ben Bella et tant d'autres figures marquantes. Mais ce panorama à la première personne d'un pays divisé, en pleine mutation économique et sociale, trace aussi le portrait nostalgique d'une longue décennie qui vit naître l'existentialisme à SaintGermain-des-Prés, triompher l'art abstrait et le New Look de Christian Dior, la 4-chevaux envahir la Nationale 7 des vacances, les maisons closes se fermer et les HLM pousser à la campagne, la télévision faire ses premiers pas et l'affaire Dominici passionner les foules. On rencontre, au détour des pages, Aragon en communiste, Sartre et Camus. Sagan écrit Bonjour tristesse et invente les années 50. Charles Trenet, Cocteau, Piaf, Bernard Buffet, l'Aga Khan font les beaux jours du Tout-Paris. Picasso déchaîne les controverses. Mimoun, Gérard Philipe, Fausto Coppi, Marcel Cerdan, Paul-Émile Victor sont les idoles de l'heure. Grace de Monaco, Martine Carol, Jean Marais font chavirer les coeurs. B.B. règne sur Saint-Tropez. Les "vrais" instits régentent encore l'école, Jacques Tati immortalise les derniers facteurs ruraux. L'Eglise fustige les moeurs d'un monde qui change trop vite. Ce livre témoignage se lit comme la chronique d'un temps à la fois très proche et très lointain, qui a le parfum inimitable des souvenirs défunts.
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